Et l’on pourrait aller longtemps et passer dans tous les compartiments et l’on pourrait dire : Dans la même proportion qu’il y a une immense tourbe de peintres qui dessinent par des lignes toutes faites. Il y a aussi peu de peintres qui regardent que de philosophes qui pensent.
Cette dénonciation d’un intellectualisme universel c’est-à-dire d’une paresse universelle consistant à toujours se servir du tout fait aura été l’une des grandes conquêtes et l’instauratio magna de la philosophie bergsonienne. Il est vrai que l’immense majorité des hommes pense par idées toutes faites. Par idées apprises. Mais il est vrai aussi, de même et partout, il est vrai que l’immense majorité des hommes voit par visions toutes faites. Par visions apprises. Il y a une paresse universelle et pour ainsi dire infatigable. C’est le travail qui se fatigue, mais la paresse, mais la fatigue ne se fatigue pas. La dénonciation de cette paresse, de cette fatigue, de cet intellectualisme constant est au seuil de l’invention bergsonienne.
On me dit : Qu’est-ce que c’est que cette invention qui ne consiste qu’à dénoncer une vieille habitude. Qu’est-ce que c’est que cette nouveauté qui consiste à dénoncer et quand même elle consisterait à révéler une tare héréditaire. Qu’est-ce que c’est que ce positif qui consiste à ne point tomber dans le négatif. Qu’est-ce que c’est que ce plus qui consiste simplement à ne point tomber dans le moins. Qu’est-ce que c’est que cette acquisition, qu’est-ce que c’est que cette conquête qui consiste à ne pas perdre ses plus anciennes provinces.
Et moi je demande : en connaissez-vous beaucoup