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OEUVRES POSTHUMES Cela étant, il est d'autant plus remarquable qu'un air, un même air a servi deux fois dans l'histoire des lettres françaises. C'est un air très simple, un air popu- laire. (Ayant noté cette défiance profonde qu'ils ont de Pair, il faudrait noter aussitôt, sur la technique même, que par exception quand ils mettent des paroles sur un air, ils choisissent toujours, ou enfin ils prennent, ils suivent naturellement des vieux airs populaires, des airs simples, bien marqués, connus, commodes, tout ce qu'il y a de plus posé. Jamais un air de musicien. Si les musiciens ont jamais fait un air.)

Or un air a servi deux fois. Et par une rencontre singulière, ou plutôt par une singulière diversion, par une singulière contrariété ce même air a servi pour ce qu'il y a peut-être de plus gracieux, et pour ce qu'il y a peut-être de plus terrible dans l'histoire des lettres françaises ; pour ce que le gracieux dix-huitième siècle nous a laissé peut-être de plus gracieux, et pour ce que le terrible dix-neuvième nous a laissé peut-être de plus terrible. Si les historiens de la littérature se préoccu- paient un peu moins d'établir sur nous la domination d'un parti intellectuel, ou de ce qui reste d'un parti intellectuel, des quelques débris qui en restent, et s'ils s'occupaient un peu de leur métier, on aurait remar- qué depuis longtemps, on aurait noté, on nous aurait dit que ce vieil air de Malbrou est un air qui a eu une singulière fortune, double, puisqu'il est d'une part celui sur lequel est établie la romance de Chérubin :

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