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C L I bord. Pour un peu on se ferait dresser un procès-ver- bal de carence.

D'autant qu'en naissant un peu après le commence- ment du siècle, quand on n'a devant soi que quatre- vingts et quelques années, et en mourant un peu avant la fin du siècle on bénéficie de ce qu'il faut nommer un double ménisque. Voici ce que je veux dire : Celui qui est né en 1790 a l'air d'être né en 1800 et ainsi il perd dix ans. Celui qui est né en 1797 a l'air d'être né en 1800 et ainsi il perd trois ans. Ceci c'est le ménisque concave. Mais celui qui naît en 1802 a l'air aussi d'être né en 1800. Et il gagne deux ans. Et ceci c'est le ménisque convexe. Ceci pour naître. Et de l'autre côté celui qui mourrait en 1913 a l'air d'être mort en 1900 ; (il n'y a que nous qui fassions la diffé- rence de 1900 à 1913 et qui comptions que ça fait treize ans, l'histoire ne les comptera pas, et pour elie 1913 c'est 1900, c'est le commencement du siècle) ; et ainsi il perd treize ans ; et c'est l'autre ménisque con- cave. Mais celui qui meurt en 85 emplit le siècle, il touche au bout, il gagne quinze ans; et c'est Vautre ménisque convexe. Quelques œuvres posthumes, savamment distribuées, aideront d'ailleurs à ceremplis- sement.

Telles sont les perspectives, telles sont les optiques temporelles, et c'est ainsi que l'on emplit un siècle, et c'est ainsi que l'on devient l'homme d'un siècle. Et il n'est pas étonnant qu'il y ait ainsi un double ménisque au commencement du siècle et un double ménisque

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