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CEUVRES POSTHUMES dans l'histoire infinie, deuxièmement parce que, dans leur système, toute histoire elle-même est finie. Il me faut une éternité pour faire l'histoire du moindre temps. Il me faut /'éternité pour faire l'histoire du moindre événement. Il me faut l'infini pour faire l'histoire du moindre fini. Voyez ce qui nous est arrivé aujourd'hui. Sous le nom de Clio nous n'avions pas assez de fiches pour établir même une pauvre petite thèse complé- mentaire. Nous n'avions, je pense, que deux fiches. Mais sous le nom de l'histoire nous allions à tant de fiches que par l'autre bout d'impossibilité il nous deve- nait impossible d'établir même peut-être une grosse thèse. Permettez, dit-elle, que je vois ici encore un symbole, s'il est encore permis d'employer ce mot. Sous mon nom de Clio^e n'ai jamais assez de fiches pour faire de l'histoire. Sous mon nom de V histoire je n'ai jamais assez peu de fiches pour faire de l'histoire. J'en ai toujours de trop. Quand il s'agit d'histoire ancienne, on ne peut pas faire d'histoire parce qu'on manque de références. Quand il s'agit d'histoire moderne on ne peut pas faire d'histoire parce qu'on regorge de réfé- rences. Voilà où ils m'ont mis, avec leur méthode de l'épuisement indéfini du détail, et leur idée de faire un infini, à force de prendre un sac, et d'y bourrer de l'in- défini.

Vous savez dit-elle, dans quelles tenailles ils m'ont mise, dans les mâchoires de quelles tenailles. Exacte- ment dans quelles deux mâchoires d'une seule tenaille. (Si on a le droit de mettre tenailles au singulier). Ou

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