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Mais ensemble traîner cette charrue qui, ainsi animée, derrière elle laboure la terre,

Ainsi l’âme, cette bête de labour, et d’un labour terrestre,
D’un labour charnel,

Non seulement l’âme doit se mouvoir et se porter sur les quatre vertus,

Se tirer et se traîner elle-même.
Mais il faut qu’elle meuve et qu’elle porte,
Encore il faut qu’elle tire et qu’elle traîne

Ce corps enfoncé dans la terre qui laboure derrière elle la glèbe de la terre.

Ce corps inerte, sans elle inanimé.
Inerte sans elle, laborieux par elle,
Qui animé par elle travailleur peut labourer cette terre,
Réussit à la labourer.

Il ne faut pas seulement qu’elle fasse son salut, elle pour elle, elle pour soi.

Il faut aussi qu’elle fasse son salut pour lui, son salut à elle l’âme pour lui le corps.

Et il faut qu’elle fasse ensemble son salut à lui qui ressuscitera.

Leur commun salut, ensemble leur double salut pour qu’après le jugement dernier,

Aussitôt après,
Ensemble ils participent à la commune félicité éternelle,
Elle l’immortelle, et lui le mortel et le mort mais le ressuscité,
Lui étant seulement devenu un corps glorieux.
Comme les deux mains sont jointes dans la prière,
Et l’une n’est pas plus injuste que l’autre,
Ainsi le corps et l’âme sont comme deux mains jointes.