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Jeannette

— Je dis comme nous sommes, et comme étaient nos saints. Ils n’avaient pas peur des coups.

Madame Gervaise

— Il n’y a qu’une sainteté. Ce sont les mêmes saints. Il n’y a qu’une sainteté, qui vient de Jésus.

Qui est la sainteté même de Jésus.

Éternellement reversée.

Jeannette

— Sainte Geneviève, saint Aignan, saint Loup n’ont pas eu peur d’aller au devant des armées païennes. Ils n’ont pas eu peur des armées païennes. Et saint Martin était un soldat. Ce n’était pas une petite troupe de soldats romains et de bourreaux romains. Ce n’étaient plus quelques décurions. Et leur petite décurie, leurs misérables petites décuries. Qu’il fallait mettre en fuite. Il ne s’agissait plus de quelques centeniers. De quelque centurion et du tiers ou du quart de leur centurie. Ils se sont précipités d’un cœur ferme au devant d’armées innombrables, des armées païennes. Ils ne baissaient pas les yeux, ceux-là. Ils ne tremblaient pas de tous leurs membres. Ils ne reniaient pas. Ils ne renonçaient pas. Et saint Bernard, qui prêcha la deuxième croisade. C’était aussi un deuxième saint. Ils portèrent le corps de Jésus au devant d’armées innombrables. Et sainte Geneviève était une pauvre femme, une petite fille de Paris. Et c’étaient des armées innombrables, des armées païennes, pleines de meurtre et de sang. Et il n’y avait