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artificielles. Comme si ce n’était pas assez déjà des grands déchirements mystiques. Ils créent ainsi des enchevêtrements.

Nous en avons eu un exemple éminent dans cette immortelle affaire Dreyfus continuée en affaire Dreyfusisme. S’il y en eut une qui sauta par dessus son point de discernement, ce fut celle-là. Elle offre, avec une perfection peut-être unique, comme une réussite peut-être unique, comme un exemple unique, presque comme un modèle un raccourci unique généralement de ce que c’est que la dégradation, l’abaissement d’une action humaine, mais non pas seulement cela : particulièrement, proprement un raccourci unique, (comme) une culmination de ce que c’est que la dégradation d’une action mystique en action politique passant (aveuglément ?) par dessus son point de rupture, par dessus son point de discernement, par dessus son point de rebroussement, par dessus son point de continuité discontinue.

Faut-il noter une fois de plus qu’il y eut, qu’il y a dans cette affaire Dreyfus, qu’ils y aura longtemps en elle, et peut-être éternellement, une vertu singulière. Je veux dire une force singulière. Nous le voyons bien aujourd’hui. À présent que l’affaire est finie. Ce n’était pas une illusion de notre jeunesse. Plus cette affaire est finie, plus il est évident qu’elle ne finira jamais. Plus elle est finie plus elle prouve. Et d’abord il faut noter qu’elle prouve qu’elle avait une vertu singulière. Dans les deux sens. Une singulière vertu de vertu tant qu’elle demeura dans la mystique. Une singulière vertu de malice aussitôt qu’elle fut entrée dans la politique. C’est un des plus grands mystères qu’il y ait dans l’histoire et dans la réalité, et naturellement aussi, naturellement