Page:Peguy oeuvres completes 04.djvu/62

Cette page a été validée par deux contributeurs.

assise, ce n’est point parce qu’elle est la République, (cette République), ce n’est point par sa vertu propre, c’est parce qu’elle est, parce que nous sommes dans une période, d’assiette. La durée de la République ne prouve pas plus la durée de la République que la durée des monarchies voisines ne prouve la durée de la Monarchie. Cette durée ne signifie point qu’elles sont durables, mais qu’elles ont commencé, qu’elles sont dans une période, durable. Qu’elles se sont trouvées comme ça, dans une période, de durée. Elles sont contemporaines, elles trempent dans le même temps, dans le même bain de durée. Elles baignent dans la même période. Elles sont du même âge. Voilà tout ce que ça prouve.

Quand donc les républicains arguënt de ce que la République dure pour dire, pour proposer, pour faire état, pour en faire cette proposition qu’elle est durable, quand ils arguënt de ce qu’elle dure depuis quarante ans pour inférer, pour conclure, pour proposer qu’elle est durable, pour quarante ans, et plus, qu’elle était au moins durable pour quarante ans, qu’elle était valable, qu’elle avait un bon au moins pour quarante ans, ils ont l’air de plaider l’évidence même. Et pourtant ils font, ils commettent une pétition, de principe, un dépassement d’attribution. Car dans la République, qui dure, ce n’est point la République, qui dure. C’est la durée. Ce n’est point elle la République qui dure en elle-même, en soi-même. Ce n’est point le régime qui dure en elle. Mais en elle c’est le temps qui dure. C’est son temps, c’est son âge. En elle ce qui dure c’est tout ce qui dure. C’est la tranquillité d’une certaine période de l’humanité,