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§30. — L’appareil n’est point l’ordre. Ou plutôt tantôt il peut être un vêtement du désordre, intérieur, tantôt un appareil, un mécanisme extérieur, un mécanisme de levier, un simple outil, une traduction extérieure fidèle, pieuse, déférente, obéissante, de l’ordre, d’un profond ordre intérieur. Une manifestation, une représentation de l’ordre. Il peut être un pardessus jeté sur du désordre. Il peut être un vêtement fidèle qui porte au dehors le secret des articulations, de l’articulation d’un ordre intérieur.

§31. — Ainsi une fois de plus ce que l’on croit communément, ce que l’on croit d’abord est tout simplement diamétralement le contraire de ce que recèle une réalité plus profonde. L’ordonnance est dans Racine, une ordonnance presque à ce point impeccable qu’elle nous pince au cœur et nous fait nous récrier. Qu’elle nous ferait crier. Mais un ordre profond, un ordre de race, un ordre de chair même est dans Corneille. Non seulement les tragédies de Racine ne sont pas toujours organisées dans le secret de leur corps, (mais au contraire machinées), mais généralement elles ne sont point organisées entre elles. Je dirais volontiers qu’elles sont comme en série numérique. Je veux dire qu’en un certain sens l’une recommence l’autre, comme un nombre recommence un nombre. Ce sont des nombres ordinaux qui se succè-