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venant d’une situation païenne, alors, mais seulement alors, par on ne sait quel coup de fortune, alors nous aurions peut-être une contre partie, la contre partie.



C’est cette gageure invraisemblable que Hugo a tenue ; c’est cette gageure qu’il a gagnée. Qu’il a naturellement tenue ; qu’il a naturellement gagnée ; sans efforcement ; sans tirer ; dans une amplitude, dans un mouvement, dans un style, dans une plénitude unique, elle-même invraisemblable, dans une sorte de balancement d’un rythme, d’un bonheur inouï, d’une fécondité incroyable. Elle-même unique et tout à fait invraisemblable. Dans une courbe d’une plénitude, d’un mouvement unique. Inouï. Une fois atteint, une fois réussi, une fois obtenu, on ne sait comment ; qui ne s’était jamais produit, qui ne recommencera jamais. Il y fallait en effet, premièrement un païen, deuxièmement un grand païen, et troisièmement que ce païen et que ce grand païen, venu après Jésus, vivant plus ou moins dans un monde chrétien, se croyant peut-être lui-même plus ou moins sincèrement plus ou moins chrétien, eût l’idée, reçût la vocation, témoin de l’extérieur, témoin extrinsèque, de considérer, de contempler, comme païen, l’un des mystères centraux du mystère chrétien.

C’est ce défi qu’il a porté, c’est cette gageure qu’il a emportée d’un coup.

C’est en effet sans aucun efforcement, sans aucun exercice, sans aucune truquerie qu’il était païen. Il était