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Mais généralement ce bail ne lui a pas profité. Ce monopole (d’État) lui a fait faire plus de facilités que de grands vers. Ses ombres viennent généralement trop, surtout à la rime, trop quand on les attend. Encore une mesure du classique et du romantique, dans le métier. Les rimes en ombre(s) de Hugo lui servaient sensiblement comme les rimes en èbre(s) servaient aux classiques quand les classiques eux aussi s’abandonnaient, se laissaient aller au métier. Quand il y avait des trous dans le génie, ce qui s’est vu, des carences, des déficiences. Des manques. Èbre(s) était le ombre(s) des classiques comme ombre(s) était le èbre(s) non pas tant des romantiques que de Hugo (qui lui seul, pour le métier, fait tout le romantique). Funèbres, ténèbres, c’est ce qui sonne dans le classique, dans le registre classique, ce que sonnent dans le registre romantique ombres, sombres, décombres. Et comme on s’y attendait ça sonne tout de même un peu mieux. Ça sonne plus noble. Ça parle moins du nez.

Quatrièmement, et tout Hugo est encore là-dedans, pour faire du vieux, pour authentiquer comme vieille sa vieille chanson il lui a mis une vieille graphie de fantaisie qui est bien la plus amusante qui soit : esbranlez, fraischement escloses. Or en face d’un vieux texte il n’y a que deux attitudes à prendre : (rassurez-vous, Halévy, nous allons le réciter deux fois) ; (c’est bien un peu pour cela que je le fais) : ou bien l’écrire tranquillement à la moderne, sans aucune affectation. C’est ainsi que je trouve dans une petite édition anglaise internationale publiée simultanément à Paris, Bruxelles et Lausanne : Les Chefs-d’Œuvre de la Poésie