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tenue ; ce ménage du jardin, ce ménage de la vigne, ce ménage des champs, ce ménage de la maison bien tenue ; et aussi ce chèvrefeuille quelquefois au coin d’un mur, montant, grimpant à la grille d’une porte, ce vieux puits, si feuillu, si moussu ; mais qui dans la réalité sert encore, sert toujours à tirer de l’eau ; tout cela vous reçoit comme un hôte, Halévy, comme un hôte respecté. Tout cela ne vous reçoit pas comme l’enfant de la maison. Peut-être n’oseraient-ils pas vous offrir le verre de vin. Vous savez, le vin de l’année, comme par hasard, eh bien j’aime mieux vous le dire : eh bien non ça n’est pas ça. Mais celui d’il y a deux ans. Et ils claquent la langue. Mais comme par ce même hasard il y a toujours une bouteille d’il y a cinq ans dans un coin de la cave. Et leur belle malice d’il y a des siècles : Vous savez, il y a un peu de poussière dessus, mais il est bon tout de même.

Je voudrais n’offenser personne. Il faut pourtant bien que je déclare que nous les gars de la Loire, c’est nous qui parlons le fin langage français. Les tables ne sont point cirées, les chaises ne sont point rempaillées, les carreaux ne sont point lavés pour vous comme pour moi. Pour vous les maisons sont accueillantes. Mais pour moi elles sont toutes ma maison. Elles sont toutes la maison de mon cousin.



C’est nous les gars de la Loire qui ne savons pas seulement, qui parlons le fin parler français. Ils savent bien tous que pendant les années innombrables de