Page:Peguy oeuvres completes 04.djvu/192

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

redouté, du gouvernement de la République. Par Jaurès, par le jauressisme, par le combisme, c’était le gouvernement même pour ainsi dire qui recevait, qui endossait Hervé.

Cela étant, il faut serrer de plus près, d’un peu plus près, il faut serrer au plus près cette affaire Hervé. Il faut bien voir ce que cela veut dire, ce qu’il y avait dedans. Et la serrant il faut bien dire que ceux qui ont fait et endossé Hervé, fait et endossé le hervéisme sont ceux qui ont fait une atteinte mortelle, qui ont porté un coup incalculable, un coup mortel à la croyance publique à l’innocence de Dreyfus. C’est par eux, surtout par eux, par Jaurès dans la mesure où il a autorisé Hervé, par Dreyfus même dans la mesure où il a autorisé Jaurès, que nous sommes retombés sur ce palier moyen, sur ce palier sans fin, à mi-côte, dont nous avons dit que nous ne sortirions, que nous ne remonterons jamais, dont nous avons dit que l’histoire ne remonterait jamais.

Car il faut enfin, en quelques mots, démonter le mécanisme de cette dangereuse, de cette démagogie mortelle. Il me semble bien, si ma mémoire est bonne, si mes souvenirs sont justes, que pendant toute l’affaire Dreyfus nous nous efforcions de démontrer que Dreyfus n’était pas un traître. Autant que je me rappelle c’étaient nos adversaires qui s’efforçaient de démontrer ou enfin qui prétendaient qu’il était un traître. Ce