Page:Peguy oeuvres completes 04.djvu/156

Cette page a été validée par deux contributeurs.

chrétienne, qu’il poussait de souche chrétienne, qu’il coulait de l’antique source. Nous pouvons aujourd’hui nous rendre ce témoignage. La Justice et la Vérité que nous avons tant aimées, à qui nous avons donné tout, notre jeunesse, tout, à qui nous nous sommes donnés tout entiers pendant tout le temps de notre jeunesse n’étaient point des vérités et des justices de concept, elles n’étaient point des justices et des vérités mortes, elles n’étaient point des justices et des vérités de livres et de bibliothèques, elles n’étaient point des justices et des vérités conceptuelles, intellectuelles, des justices et des vérités de parti intellectuel, mais elles étaient organiques, elles étaient chrétiennes, elles n’étaient nullement modernes, elles étaient éternelles et non point temporelles seulement, elles étaient des Justices et des Vérités, une Justice et une Vérité vivantes. Et de tous les sentiments qui ensemble nous poussèrent, dans un tremblement, dans cette crise unique, aujourd’hui nous pouvons avouer que de toutes les passions qui nous poussèrent dans cette ardeur et dans ce bouillonnement, dans ce gonflement et dans ce tumulte, une vertu était au cœur, et que c’était la vertu de charité. Et je ne veux pas rouvrir un ancien débat, aujourd’hui, désormais historique, mais dans nos ennemis, chez nos ennemis, chez nos adversaires d’alors, historiques comme nous, devenus historiques, je vois beaucoup d’intelligence, beaucoup de lucidité même, beaucoup d’acuité : ce qui me frappe le plus, c’est certainement un certain manque de charité. Je ne veux pas anticiper sur ce qui est le propre des confessions. Mais il est incontestable que dans tout notre socialisme même il y avait infiniment plus de chris-