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plus fréquent, inévitable, désirable même, car il faut bien qu’un peuple se refasse, et se refasse de toutes ses forces), je commence par lui dire : Vous ne nous connaissez pas. Vous avez le droit de ne pas nous connaître. Nos politiciens ont fait une telle Foire sur la Place que vous ne pouviez pas voir ce qui se passait dans la maison. Nos politiciens n’ont pas dévoré seulement, absorbé notre mystique. Ils la masquaient complètement, au moins au public, à ce qu’on nomme le grand public. Vous n’étiez pas abonné aux cahiers. C’est tout naturel. Vous aviez autre chose à faire. Vous ne lisiez pas les cahiers. Mais cette mystique dont nous parlons, nous ne l’inventons pas aujourd’hui pour les besoins de la cause, nous ne l’improvisons pas aujourd’hui. Elle fut pendant dix et quinze ans la mystique même de ces cahiers en toutes ces matières et nous l’avons assez souvent manifestée. La seule différence qu’il y avait, c’est que masqués par les politiciens nos cahiers ne parvenaient point alors auprès du grand public et qu’aujourd’hui, dans le désarroi des politiciens, et sans doute pour une autre cause, et au moins même pour deux, ils y parviennent.

La seule différence qu’il y a, c’est qu’on ne nous lisait point ; et que l’on commence à nous lire.

Et d’autre part il est certain que nous sommes les seuls, qu’il n’y a que nous qui depuis quinze ans ayons tenu rigoureusement, impeccablement, infailliblement cette mystique. Là était notre force. Et aujourd’hui, obscure avec nous, ignorée avec nous, conservée avec