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meurtri comme Français tous ceux de l’Alsace et de la Lorraine annexée.

C’est bien mal connaître la politique juive, au moment même qu’on en parle, que de supposer que ce soit la politique juive et le parti juif qui aient jamais soulevé une affaire comme l’affaire Dreyfus. Au contraire. Ce ne sont jamais eux qui soulèvent les tumultes. Ils ne demandent, ils ne recherchent que le silence. Ils ne demandent qu’à se faire oublier. Sauf quelques écervelés, ils ne recherchent que l’ombre et le silence.

En fait et dans le détail même c’est ne pas connaître un mot de l’affaire Dreyfus et du dreyfusisme et notamment de la manière dont elle a commencé que de croire, que de s’imaginer qu’elle est comme une invention, une fabrication, une forgerie du parti juif, de la politique juive, que le parti juif, la politique juive ait vu de bon cœur poindre le commencement de cette affaire. C’est très exactement le contraire. Ils ne savaient pas bien, mais ils se méfiaient. Ils avaient raison de se méfier. Au point de vue des intérêts. Cette affaire, somme toute, et sous des victoires apparentes, sous des aspects de conquête(s), sous des surfaces de triomphe, leur a fait (beaucoup) plus de mal que de bien.

Au point où en est tombée aujourd’hui la courbe de l’histoire de cette affaire, nous pouvons dire en effet aujourd’hui qu’une première fois nous fûmes vainqueurs des antidreyfusistes dreyfusistes ; qu’une deuxième fois nous fûmes vaincus par les antidreyfusistes dreyfusistes ; qu’aujourd’hui enfin nous sommes en train d’être vaincus par les deux ensemble.