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sans aucune exception, seraient sauvés de la misère, étant donné que toutes les vies économiques, sans aucune exception, seraient assurées dans la cité, la répartition des biens entre les riches différents et les pauvres, la suppression des inégalités économiques, l’équitable répartition de la richesse entre tous les citoyens n’est plus qu’un des nombreux problèmes qui se posent dans la cité instituée enfin. Le problème économique de répartir également, ou équitablement, les biens entre tous les citoyens n’est pas du même ordre que le problème économique de sauver tous les citoyens, sans aucune exception, de la misère ; sauver tous les miséreux de la misère est un problème impérieux, antérieur à l’institution véritable de la cité ; attribuer à tous les citoyens des parts égales, ou équitables, de richesses est un des nombreux problèmes de la cité instituée ; le problème de la misère est un problème incomparable, indiscutable, posé, posé d’avance, dans la réalité, un problème de la cité à bâtir ; nous devons le résoudre et nous n’avons pas à discuter si nous devons le résoudre ; nous n’avons qu’à discuter comment nous pouvons le résoudre ; c’est un problème sans relâche ; au contraire le problème de la pauvreté est pour ainsi dire un problème de loisir, un problème de la cité habitée, un problème comparable, discutable, que les citoyens se poseront après, s’ils veulent ; avant d’examiner comment ils pourront le résoudre, ils pourront examiner même s’ils doivent se le poser.

Qu’on me permette une comparaison théologique : l’enfer est essentiellement qualifié comme l’effet d’une excommunication divine ; le damné est un excommunié de par Dieu ; il est mis par Dieu hors de la communion