se fait des reproches. Le texte, maître et prétexte et désespoir du traducteur jouet, le texte ennemi de toute traduction. Tant il est vrai que les textes sont littéralement incommunicables, et que nous devons renoncer à cette insoutenable hypothèse, à cet indéfendable postulat des méthodes historiques prétendues scientifiques, modernes : qu’il peut y avoir, qu’il y a des transcriptions, des transpositions, des traductions, des transferts, des communications exactement exactes. Ce qui est vrai, au contraire, ce que la réalité nous enseigne impitoyablement et sans aucune exception, c’est que toute opération de cet ordre, toute opération de déplacement, sans aucune exception, entraîne impitoyablement et irrévocablement une déperdition, une altération, et que cette déperdition, cette altération est toujours considérable.
Pour qui n’a pas le texte sous les yeux, une traduction est toujours trop compliquée. Pour qui a le texte sous les yeux, une traduction est toujours trop lâche.
C’est la commune misère de tout travail humain ; le mystérieux balancement : quand on a la fraîcheur, on n’a pas la compétence. Et quand vient un peu la compétence, on s’aperçoit qu’on n’a plus la fraîcheur, qui ne reviendra jamais, que rien ne remplace, qui est le premier des biens.
Quand on pose la question ainsi, d’ailleurs, il est impossible de se soustraire à la constatation de cette vérité élémentaire ; mais le jeu des tenants des méthodes historiques prétendues scientifiques, modernes, est de faire semblant de ne pas voir que la question se pose ainsi.
Tout ce que je me suis permis sur Leconte de Lisle a