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Voilà des accidents que Jaurès n’eût pas craints s’il n’avait point été chercher ses hommes ailleurs, si lui-même il n’était point parti se balader ailleurs, dans des pays perdus ; voilà des accidents qu’il n’eût point eu à redouter, des petits lâchages qu’il n’eût point risqué d’avoir à subir, s’il n’eût point pris des hommes comme Léon Blum, ayant à prendre des hommes comme Tharaud. Comme les deux Tharaud, qui sont la constance même. Quand on pense que Herr pouvait prendre les deux Tharaud, qu’il avait sous la main, puisqu’ils s’étaient résolus à devenir en partie des journalistes. Et quand on pense que l’on s’est amusé à les laisser filer ailleurs. C’était jouer la difficulté. C’était jouer la ruine. C’était jouer la misère et la trahison. Et c’est ainsi que l’on fait les maisons mauvaises.

Voilà un accident, enfin, que ni Herr ni Jaurès n’avaient à redouter avec un homme comme était notre collaborateur Avenard. Et je ne puis pas m’empêcher de noter que l’Humanité a eu deux fois des correspondances qui ont attiré l’attention. Et aux deux fois les auteurs de ces correspondances étaient des hommes qui n’étaient point d’ailleurs, qui étaient de ce pays-ci, qui tenaient à nous de quelque façon. La première de ces deux fois fut, presque aussitôt après la fondation du journal, quelques semaines après, je crois, peut-être moins, le reportage d’un voyage à Rome et en Italie qui était, si mes souvenirs sont exacts, le voyage du président de la République en visite auprès des souverains et du peuple italien. L’auteur de ce reportage très remarqué était déjà un homme sur qui je n’ai assurément aucuns droits à faire valoir, un homme que je