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les Châtiments, livre III, x, l’Empereur s’amuse, une chanson ; le refrain de cette chanson :

Sonne aujourd’hui le glas, bourdon de Notre-Dame,
Et demain le tocsin !

Ô deuil ! par un bandit féroce
L’avenir est mort poignardé !
C’est aujourd’hui la grande noce,
Le fiancé monte en carrosse ;
C’est lui ! César le bien gardé !
Peuples, chantez l’épithalame !
La France épouse l’assassin. —

Sonne aujourd’hui le glas, bourdon de Notre-Dame,
Et demain le tocsin !

Jersey, décembre 1853. — Quelle admirable invention de rythme ; quel refrain de bourdon ; et encore cette apparition des clochers dans cette nuit-là, mêmes Châtiments, livre I, v ; et ce sens et cette vision de Paris, de tout le Paris ancien et nouveau, ramassé, de toute l’histoire de Paris :

Comme ils sortaient tous trois de la maison Bancal,
Morny, Maupas le grec, Saint-Arnaud le chacal,
Voyant passer ce groupe oblique et taciturne,
Les clochers de Paris, sonnant l’heure nocturne,
S’efforçaient vainement d’imiter le tocsin ;
Les pavés de Juillet criaient : À l’assassin !
Tous les spectres sanglants des antiques carnages,
Réveillés, se montraient du doigt ces personnages ;
La Marseillaise, archange aux chants aériens,
Murmurait dans les cieux : Aux armes, citoyens !