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en faveur gouvernementale, du gouvernement ; mais voilà ; lui-même il se dit : c’est de la politique ; ce sont des boniments politiques ; c’est bon pour le public politique ; — les politiques eux-mêmes pensent comme nous de la politique ; ils sont les premiers à l’estimer ce qu’elle vaut, c’est-à-dire à la mépriser ; mais ils disent : voilà, c’est de la politique ; — et ce mot excuse tout ; on fait ainsi, on délimite un domaine séparé où les obligations les plus simples de la morale ne fonctionnent plus, ne pénètrent pas, où les devoirs les plus élémentaires sont nuls et non avenus ; et les hommes politiques sont les premiers à savoir le peu que vaut le public politique.

Je n’ai aucune illusion sur le nouveau ministérialisme, sur le ministérialisme politique parlementaire de M. Clemenceau ; comme tout le monde je suis excédé de lire tous les matins dans l’Aurore le même article, où toute l’argumentation, fort brillante, revient à qualifier de romains les catholiques français ; comme si ce n’était pas une gageure d’aberration dans le jugement historique et social que de nommer romain tout un culte rituel, toute une religion, aussi vieille, aussi indigène, aussi terrienne, et aussi enracinée ; étaient-ils donc des Romains, un Théroude et un Villon, un Ronsard et un du Bellay, un Descartes, un Corneille, un Pascal, un Racine, un Chateaubriand, un Lamartine, un Pasteur ; devons-nous croire, si nous sommes sérieux, que nulles traces de leurs anciens et de leurs nouveaux catholicismes français n’aient subsisté dans ce pays ; devons-nous croire, si nous sommes sérieux et historiens, que tout un héritage de pensée, de sentiment, de religion, d’âme, aussi vieux, que tout un passé,