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ments qui avaient tort et l’hypothèse qui avait quand même raison ?

— Je ne l’ai point pensé.

— Vous n’avez point prétendu que vous alliez d’autant mieux que vous étiez plus douloureusement éprouvé ?

— Je ne l’ai point prétendu.

— Voilà qui est fort heureux, et vous avez été bien bon. Ignorez-vous que ce que vous n’avez pas fait se fait communément aujourd’hui ?

— Je m’en doutais bien un peu.

— Quels furent vos ennuis ?

— Je pensais qu’en tombant malade j’avais justifié les prophéties ; mais cette justification ne me donnait aucun orgueil.

— Quelles prophéties ?

— La prophétie qu’il arriverait malheur aux cahiers, parce que l’on ne fondait jamais une entreprise considérable sur un seul homme.

— Ces prophètes étaient de bon conseil.

— Ils oubliaient que je n’étais pas tout à fait seul, et que, si presque tout le travail me revenait, j’avais de solides amitiés pour me donner du courage.

— Qu’arriva-t-il ensuite ? comme on dit dans les livres élémentaires.

— Sur la recommandation de mon ami Jean Tharaud, qui m’en avait dit le plus grand bien, je pris ma petite édition classique des Pensées de Pascal, publiées dans leur texte authentique avec un commentaire suivi par Ernest Havet, ancien élève de l’École Normale, Maître de Conférences à cette École, Agrégé de la Faculté des Lettres de Paris, et dans cette édition, qui me rappelait