Page:Peguy oeuvres completes 01.djvu/355

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

citoyen Lucien Rolland, ou mieux Lucien Roland, qui était du parti.

Vous ne savez peut-être pas ce que ça veut dire. Dans les commencements, quand on parlait de quelqu’un devant moi, et qu’on disait : Il est du parti, j’entendais qu’il était du parti socialiste. Ignorance grossière où je languissais. Grossier malentendu où dépérissait mon enfance intellectuelle. Sachez, monsieur, si vous êtes aussi bête que je le fus, connaissez que lorsqu’on dit de quelqu’un devant vous : Il est du parti, cela veut dire qu’il est du parti ouvrier français. Il y a des fois où je me trompe encore. Mais c’est que ça m’échappe.

La séance commença pour l’élection définitive. J’avais prévenu mon petit cousin. Tous ses amis l’avaient prévenu. — Viens, qu’on lui avait dit. Mais il nous avait répondu que le travail qu’il fournirait à Paris comme libraire éditeur pour le même prix et dans le même temps serait plus utile pour la préparation de la Révolution sociale que d’aller soutenir sa candidature sur place. Il avait tort, car la question n’est pas de travailler plus efficacement à la meilleure préparation de la Révolution sociale ; mais la seule question est de savoir plaire aux citoyens électeurs. Un voyage à Orléans, aller et retour, ne coûte pas dix francs de chemin de fer. En troisième classe. Mettons vingt francs avec les frais. Mettons deux jours, en comptant la fatigue. Mon petit cousin pensait que vingt francs de sa monnaie et deux jours de son travail à Paris donneraient beaucoup plus d’effet socialiste révolutionnaire qu’un bafouillage de trois quarts d’heure au groupe d’études sociales d’Orléans, devant quinze personnes. Il avait raison. Seulement il avait tort tout de même, parce que ces