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coup moins de paresseux dans une cité où la plupart des métiers seront sans cesse ouverts à tous, parce qu’il y aura beaucoup moins de fausses vocations, parce qu’il n’y aura point de vocations forcées, parce que les vies mal engagées ne le seront point sans retour possible. Enfin si, dans une cité où trois ou quatre heures au plus d’un travail facile suffiront pour assurer la vie quotidienne, si, dans une telle cité, il se trouve encore des paresseux qui refusent toute espèce de travail, ces malades ne mourront pas de faim dans une cité qui sera aussi riche en moyens de consommation, mais on les réduira au strict nécessaire. — Ils seront donc, dira-t-on, entretenus aux frais de la cité ? — Sans doute, mais que fait la société présente, sinon de les entretenir aussi, et très cher, dans ses asiles, ses hôpitaux, ses prisons, ses colonies de relégation, ou dans ses plus somptueux hôtels, parasites mendiants ou parasites luxueux, ou bien ouvriers des mauvais métiers.

Selon cette méthode d’analyse exacte et de comparaison, toujours on verra que ce sont justement les pis-allers de la cité socialiste, supposés, qui sont la règle habituelle, réelle, de la société présente.

Ainsi renseignés provisoirement sur ce que serait la prochaine cité socialiste, ces jeunes gens n’hésitèrent pas. Il n’y avait plus qu’à préparer la naissance de cette cité, il n’y avait qu’à préparer puis à faire la révolution sociale.

Pour préparer la révolution sociale on n’invoquerait pas les anciens, on n’irait pas chercher les hommes de trente à quatre-vingts ans, qui étaient en immense majorité contaminés du vice bourgeois, mais on ferait appel aux seuls jeunes gens. Et cela suffirait bien. Si l’on convertit soigneusement au socialisme les générations montantes, si