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tions, car je sais que les longues histoires sont les seules qui soient vraies à peu près. Et aujourd’hui je ne donnerais pas la brève histoire de l’apprentissage commun. Mais je suis forcé de parler pour ma maison.

À l’heure où commence mon histoire, ces jeunes gens étaient donc venus sincèrement au socialisme et profondément. Ils ne savaient pas bien ce que c’était que le socialisme. Ils ne pensaient pas que ce fût un domaine à partager entre plusieurs gros propriétaires. Ils s’imaginaient que le socialisme était l’ensemble de ce qui prépare la révolution sociale et pensaient que cette révolution sociale tendait à faire le bonheur de l’humanité. Le même historien Pierre Deloire, négligeant un peu ses travaux professionnels, avait rédigé non pas un catéchisme ou un manuel — car personne alors n’eût oser parler de catéchisme ou de manuel socialiste, — mais un raccourci commode. Il publia ce raccourci dans la même Revue Socialiste, le 15 août 1897. Si imparfait que ce raccourci me paraisse à présent, il convient que je le reproduise en entier :

DE LA CITÉ SOCIALISTE

Dans la cité socialiste les biens sociaux seront bien administrés.

Les socialistes veulent remplacer autant que possible le gouvernement des hommes en société par l’administration sociale des choses, des biens : En effet, les hommes étant variés indéfiniment, ce qui est bon d’ailleurs, on ne peut pas organiser le gouvernement des hommes selon une exacte méthode scientifique ; tandis que, les biens n’étant pas indéfiniment variés, on peut organiser selon une exacte méthode scientifique l’administration des biens. Or la plupart des difficultés, des