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rieur. Un recensement récent a permis de savoir qu’il en restait 670 exemplaires.

Ici mon ami René Lardenois prit sur ma table un vieux petit crayon et un morceau de papier blanc déchiré, marmonna quelques mots incompréhensibles : sept fois deux quatorze et je retiens un ; sept fois cinq trente-cinq et un trente-six, et je retiens trois ; sept et trois dix ;

Six fois deux douze et je retiens un ; cinq fois six trente, et un, trente-et-un, et je retiens trois ; six et trois neuf ;

Quatre ; six et deux huit ; un ; neuf et un dix. Un chiffre à droite. Il mit une virgule.

Et s’écria brusquement : mille dix-huit kilos, quatre cents grammes : il n’est pas étonnant qu’il soit encombré, le magasin.

J’entendis alors qu’il avait calculé le poids total de ces six cents ou six cent soixante-dix volumes. Je lui répondis :

— Je ne sais ni par expérience ni par témoignage que le magasin soit encombré. C’est sur le calcul aussi que je fondais cette supposition.

Notre ami Pierre Baudouin me conta qu’il avait alors de grandes ignorances et qu’il avait eu soin de signer les exemplaires qu’il vendait et donnait à ses amis et camarades ; et même, ayant un respect superstitieux de sa signature et de toute écriture sienne, il avait eu soin d’éviter que les mots qu’il soussignait fussent de simples formules vaines et menteuses. Mais, depuis, il advint cette histoire incroyable : que pendant une certaine affaire dont le nom m’échappe et qui, m’a dit Baudouin, passionna la France et le monde au cours