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graphe, où le témoignage est de la pauvreté surtout et de la charité ; je le passerais, comme j’ai passé le témoignage où madame Périer nous indiquait pourquoi Pascal n’est pas devenu socialiste, je le passerais si la pauvreté n’y était liée indissolublement à la maladie et à la souffrance :


et pour cela j’ai pensé d’avoir céans un pauvre malade à qui on rende les mêmes services comme à moi, qu’on prenne une garde exprès, et enfin qu’il n’y ait aucune différence de lui à moi, afin que j’aie cette consolation de savoir qu’il y a un pauvre aussi bien traité que moi, dans la confusion que je souffre de me voir dans la grande abondance de toutes choses où je me vois. Car quand je pense qu’au même temps que je suis si bien, il y a une infinité de pauvres qui sont plus malades que moi, et qui manquent des choses les plus nécessaires, cela me fait une peine que je ne puis supporter ; et ainsi je vous prie de demander un malade à M. le curé pour le dessein que j’ai.

» J’envoyai à M. le curé à l’heure même, qui manda qu’il n’y en avait point qui fût en état d’être transporté ; mais qu’il lui donnerait, aussitôt qu’il serait guéri, un moyen d’exercer la charité, en se chargeant d’un vieux homme dont il prendrait soin le reste de sa vie : car M. le curé ne doutait pas alors qu’il ne dût guérir.

» Comme il vit qu’il ne pouvait pas avoir un pauvre en sa maison avec lui, il me pria donc de lui faire cette grâce de le faire porter aux Incurables, parce qu’il avait grand désir de mourir en la compagnie des pauvres. Je lui dis que les médecins ne trouvaient pas à propos de le transporter en l’état où il était, ce qui le fâcha beau-