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Je me jetai sur le lit pour me relever le moment d’après. Je manquais d’air. Tout à coup j’entendis quelque chose gratter doucement au guichet. Je m’approchai de la porte. À travers le carré de vitre moisie, je pus, petit à petit, distinguer un visage de vieille femme. Elle avait de grands yeux ronds et immobiles comme ceux d’une chouette ; ils étaient veinés de rouge en tous sens ; les paupières, le tour des yeux, le front de la vieille étaient sillonnés de rides profondes. De rares cheveux gris pendaient en désordre autour de cette tête étrange qui branlait de vieillesse… Toute la vieille tremblait des pieds à la tête. Elle s’enveloppait dans une robe d’indienne passée, usée et toute sale. Malgré sa laideur, cette femme ne m’inspira aucun sentiment de dégoût. Je ne fus pris que d’une intense pitié.

— Qui es-tu, mon pauvre enfant ? me demanda-t-elle tout à coup d’une voix douce et basse.

Je le lui dis.

— Qu’as-tu fait ?

Au lieu de la courte réponse que j’aurais donnée à cette question en toute autre circonstance, j’éclatai en un long monologue désordonné où je déversai toute la douleur qui s’était de longue date amassée en mon âme ; je finis par fondre en larmes, ces bonnes larmes comme en pleurent les enfants. Elles ruisselaient si abondamment…

Je tressaillais de tout mon corps, je m’efforçai d’étouffer les sanglots qui ébranlaient tout mon être.