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encore en Europe que le nom ; en 1771, il avait publié une traduction des textes zend sous le titre de Zend Avesta, ouvrage de Zoroastre. Pendant un demi-siècle, le travail d’Anquetil-Duperron fut accepté comme une œuvre sur laquelle il n’y avait pas à revenir et aussi critiquée avec ironie. Personne ne s’était encore rencontré qui fût en état de la contrôler, d’en apprécier le mérite et d’en relever les inexactitudes. L’intrépide voyageur, cependant, avait fait sa traduction en toute conscience ; la preuve de sa bonne foi, c’est qu’il avait déposé à la bibliothèque du roi les précieux manuscrits. N’était-ce pas dire : voyez et jugez ! Poussé par l’instinct de divination qui lui fit accomplir tant de grandes choses, M. E. Burnouf interrogea ces pages mystérieuses. À force de patientes investigations, de sagacité, d’efforts persévérants, il compléta, en la refondant, la traduction de son devancier. Il semblait, d’ailleurs, qu’une merveilleuse destinée s’attachât à ces livres antiques, dont l’interprétation devait placer M. E. Burnouf, dès les premiers pas de sa carrière, parmi les maîtres de la science philologique. Après l’invasion musulmane qui avait ruiné leur patrie, les Parsis ou anciens Perses demeurés fidèles au culte de leurs ancêtres, se réfugient dans les montagnes du Kohistan. Ils y séjournent cent ans, puis fuyant toujours devant la persécution, ils restent quinze ans à Ormuz, sur le golfe Persique, dix-neuf ans à Diu et se retirent enfin dans le Guzerate. Après avoir vécu pendant trois siècles, réunis aux environs de la forêt de Sandjan, où ils conservent encore aujourd’hui le feu sacré, les Parsis se dispersèrent. L’exil quoiqu’on fasse, affaiblît toujours un peu le souvenir de la patrie. Depuis longtemps les Parsis n’entendaient plus le zend ; le pehlvi, idiome plus moderne, quoique fort ancien, qui avait remplacé le zend comme langue sacrée, était à peu près entièrement oublié, au quatorzième siècle de notre ère, de ces mêmes émigrés, sectateurs obstinés de la religion de Zoroastre. Ils avaient perdu dans leur émigration jusqu’à la copie des livres qui contenaient le symbole de leur croyance. Au commencement du dix-huitième siècle, un Destour ou docteur du Kerman, qui visitait ses coreligionnaires du Guzerate, fut surpris et affligé de leur ignorance. Il forma à Barroche et à Surate des disciples auxquels il confia le soin de faire revivre après lui la connaissance des idiomes zend et pehlvi qu’il possédait lui-même ; enfin il laissa entre leurs mains une copie des livres authentiques écrite dans les deux langues. En 1763, Anquetil-Duperron, âgé de vingt et un ans, rêve la découverte des textes