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l’Europe ; elle est, selon l’expression de M. Ampère, « un des anneaux les plus importants de la chaîne immense qui unit l’Himalaya à l’Hécla. » Cette langue mystérieuse se fait jour dans le latin, dans le grec, dans le celtique, etc. ; chez tous les peuples, qui ont perdu l’histoire de leurs origines, elle accuse un lien de parenté. Voilà qui simplifie singulièrement la question si controversée des races humaines. D’autre part, on voit le bouddhisme, si puissant dans son expansion, porter les idées indiennes avec la langue de l’Inde sur le littoral de la presqu’île au delà du Gange et jusqu’au Cambodge. Il exista donc, dès les temps anciens, des relations suivies entre ces peuples divers. À quelle époque et à la suite de quels événements les liens avec l’Inde furent ils rompus ? Comment l’islamisme, à qui la Providence semble avoir livré une si notable partie de l’Asie, pénétra-t-il si avant dans l’esprit des peuples malays, qui avaient entendu parler des conquêtes d’Alexandre, sans doute par les traditions apportées des bords du Gange, et qui déjà s’étaient appropriés les grandes épopées indiennes en les traduisant dans leurs propres langues ?

Dans cette Asie si vaste, berceau de tant de peuples et de tant de croyances, le domaine que s’était fait M. E. Burnouf, ou plutôt qu’il avait conquis par de persévérants et de glorieux travaux, s’étendait aussi loin que les ramifications de la langue et des idées indiennes ; mais il ne portait point ses prétentions là où il rencontrait des idiomes étrangers à ses études habituelles. Combien d’alphabets anciens et modernes a-t-il étudiés et comparés ? Il serait difficile de les compter. À l’exception des caractères chinois qui ne sont pas des signes alphabétiques, il les lisait à peu près tous. Cette aptitude particulière, qu’il avait à déchiffrer toutes les écritures, le porta à entreprendre la lecture des inscriptions cunéiformes trouvées près d’Hamadan, l’ancienne Ecbatane : il publia, sous forme de mémoire, le résultat de ses recherches en 1836. Déjà M. Grotefend, et, après lui, Saint-Martin, étaient parvenus à fixer la valeur de plusieurs de ces caractères étranges, formés d’un certain nombre d’incisions à forme de coin. De son côté, M. Lassen abordait le même travail, et il obtenait des résultats peu différents de ceux que M. E. Burnouf avait obtenus lui-même. Les inscriptions d’Hamadan étaient en langue zend ; pour l’auteur du commentaire sur le yaçna, il ne restait donc qu’à bien déterminer l’alphabet, à le compléter après M. Grotefend, qui du premier coup avait lu les noms de Xerxès et