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§ 5. Les Odes disent :

« Avant que les Princes de la dynastie de Yn eussent perdu l’affection du peuple,
» Ils pouvaient être comparés au Très-Haut.
» Nous pouvons considérer dans eux, comme dans un miroir,
» Que le décret ou la volonté du ciel n’est pas facile à conserver. »

Ce qui veut dire :

Obtiens l’affection du peuple, tu obtiendras et conserveras l’empire ;
Perds l’affection du peuple et tu perdras l’empire[1].

§ 6. C’est pourquoi un prince doit, avant tout, se livrer soigneusement à la pratique de la vertu. S’il possède la vertu, il possédera le cœur des hommes ; s’il possède le cœur des hommes, il possédera aussi le territoire ou la souveraineté ; s’il possède le territoire, il en aura les revenus ; s’il en a les revenus, il pourra en faire usage (pour l’administration de l’état).

  1. Un commentateur ajoute : « La fortune du prince dépend du Ciel, et la volonté du Ciel existe dans le peuple. Si le prince obtient l’affection et l’amour du peuple, le Très-Haut le regardera avec complaisance et affermira son trône ; mais s’il perd l’amour et l’affection du peuple, le Très-Haut le regardera avec colère, et il perdra sa puissance. »

    Par Très-Haut, litt. : Suprême Empereur (Chang-ti), les Chinois entendent un pouvoir au-dessus de l’empereur auquel celui-ci doit obéir : pouvoir vague non défini, souvent confondu avec le thien, ciel visible et invisible qui influe et domine sur toutes choses ; c’est à cette puissance suprême que les Chinois attribuent le pouvoir d’affermir et de renverser les trônes.

    Il paraît, remarque le rév. Collie, que la maxime : vox populi, vox Dei, n’est pas d’hier, mais qu’elle a été professée par les écrivains politiques de cette nation, dont le gouvernement a été regardé comme un modèle de despotisme. Un principe constamment professé par Mencius et d’autres philosophes chinois, c’est que, « toutes les fois qu’un prince régnant perd l’affection de la grande majorité du peuple, en agissant contrairement à ce que le peuple regarde comme le bien général, ce prince était rejeté ou désavoué par le Ciel, et devait être détrôné par celui qui, au moyen d’un vertueux et bienveillant accomplissement de ses devoirs, a gagné le cœur de la nation. »