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Quand vous baisez ces mains que la vie a froissées,
quand vous abandonnez vos plus chères pensées
entre ces lentes mains, sœurs des ailes blessées,
sur l’eau morte des temps affleure un souvenir.
Je retrouve un moment une vie abolie,
je revois deux bouleaux au bord d’une eau polie
tendrement curieux de leur double reflet.
Leurs racines cèlaient au secret de la terre
les sourds cheminements où se cherchaient leur sève,
le poids léger du ciel leur jetait un oiseau
et dans ses chants d’azur frissonnaient leurs deux rêves
tandis qu’un souffle errant caressait de lumière
l’effusive douceur qui mêlait leurs rameaux.

Plus rien n’aborde en moi de cette obscure vie.
L’éclair du souvenir n’a surpris l’eau polie
que le temps d’un baiser.


(Rondo capriccioso, I)


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