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IV
PRÉFACE.

tout rituel et tout officiel, n’est qu’une réduction de la vaste divinité de Zeus. Sa Junon conjugale, matrone plutôt que reine du ciel, sorte de sage-femme olympienne présidant aux accouchements, gardienne de l’argent et des trésors domestiques, ne peut être identifiée à Héra, la grande déesse azurée et orageuse du firmament grec. Le Mercure italique, trafiquant de naissance, étroitement confiné dans le patronage spécial du commerce, n’a rien de commun avec l’Hermès mobile et multiple des mythes homériques. Minerve, dépouillée des vertus guerrières et des grands traits héroïques qui caractérisent Pallas-Athéné, reparaît à Rome sous la figure pédantesque d’une déesse scolaire. Mars, dieu indigène et national du Latium, se distingue tout à fait d’Arès, qui n’occupe dans l’Olympe grec qu’une place subalterne. Rome n’eut jamais l’imagination ouverte aux merveilles et aux mirages de la mer, et son froid Neptune copie Poséidon sans lui ressembler. Cérès n’est qu’une maigre glane de la fertile Déméter. Diane elle-même ne peut guère passer que pour une pâle doublure d’Artémis.

Il est temps de séparer, par le changement radical des noms, la mythologie plagiaire des peuples latins de la mythologie créatrice et originale des races helléniques. Même quand elle s’y rattache par l’em-