Page:Paul de Saint-Victor - Les deux masques, tome 1.djvu/222

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
212
ESCHYLE.

nébrer. Le monde finit à ses hautes murailles où les archers veillent sur les plates-formes. Ce sombre Éden des voluptés du maître séquestre ses Èves, il ne donne sur aucune vue du dehors. Au delà, l’Empire comprenant la terre du soleil ; plus loin des régions obscures, des peuples confus, de plus en plus étranges, de moins en moins visibles, qui se perdent dans l’Occident nébuleux. Darius demandait, après l’incendie de Sardes, ce que c’était qu’Athènes ; sa veuve peut donc faire la même question aux Fidèles. C’est alors qu’éclate ce dialogue où la louange de la cité de Pallas sort d’un tour si imprévu et si fier ; Atossa interroge et les réponses retentissent comme des coups de ciseau taillant une statue superbe. De vers en vers, trait par trait, une figure se forme et s’élance, révélant à la reine barbare la fière beauté d’une race libre.

— « En attendant, amis, où dit-on qu’Athènes est située ? » — « Bien loin d’ici, vers le couchant, sous les derniers feux du Soleil roi. » — « Et c’est la ville dont mon fils a si grand désir de faire la conquête ? » — « L’Hellade alors lui serait soumise tout entière. » — « Ont-ils donc une si grande armée ? » — « Une armée assez grande pour avoir fait aux Mèdes bien des maux. » — « Et que possèdent-ils encore avec cette armée, de grandes richesses ? » — « Une source d’argent tout ouverte, trésor de la terre. » — « Est-ce de l’arc et des flèches que leurs deux mains sont armées ? » — « Nullement, ils ont l’airain de la lance tendue, l’abri du bouclier. » — « Quel roi les gouverne ? Quel est le maître de cette armée ? » — « Ils ne sont esclaves ni sujets