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ESCHYLE.

μαστά. La gloire seule pouvait l’inspirer : Clio, la muse de l’histoire, sonne d’un clairon de triomphe, et se couronne de lauriers.

La Philosophie sans écoles, réduite à des conceptions solitaires, hallucinée peut-être par les rêveries orientales, aurait-elle retrouvé la voie de la raison pure ? Je ne vois point Socrate errant par les rues d’une bourgade à demi persane, et arrêtant les fellahs grossiers d’un satrape, pour leur poser des questions subtiles. « L’accoucheur des esprits » n’aurait tiré que des avortements de ces cerveaux morts. Que de loisir et que de bonheur supposent les Dialogues de Platon, lentement promenés aux bords de l’Ilissus, ou groupés sous une colonne du Gymnase, devant un auditoire de beaux éphèbes couronnés de joncs ! Cette musique divine des idées aurait-elle pu résonner sur ses légers modes, entre les cris d’un camp barbare et les incantations d’un collège de mages ?

L’Éloquence aurait péri avec la liberté qui l’inspire ; l’orateur est bâillonné quand l’agora est fermée. On peut convaincre par le raisonnement ou par l’enthousiasme l’âme d’une multitude intelligente et mobile ; aucune parole ne saurait percer la surdité d’une idole royale, invisible et inaccessible, dont l’arbitraire est l’unique loi. Démosthènes méditant, contre le despote de la Perse, les discours