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SECONDE GUERRE MÉDIQUE.

de chacal, avec un mépris courroucé. — « Tu me rabaisses jusqu’à terre, lui dit-il, en m’invitant à insulter un mort. Tu parles de venger Léonidas ; je crois sa mort et celle de ses compagnons amplement expiée par les innombrables Barbares qui sont tombés sous nos glaives. Ne reparais plus en ma présence, et tiens-toi pour content de n’être point châtié d’un pareil conseil. »

Une belle vengeance sculpturale, la seule exercée après la victoire, fut la création de l’ordre Persique. Des prisonniers perses accroupis dans les postures humiliées des cariatides, y portaient le poids des entablements. Mardonios passa le premier par ces fourches caudines de l’art : Sparte l’écrasa en effigie, sous la colonne d’un temple de la Victoire.

Comme Marathon et comme Salamine, la bataille de Platée, qui acheva si grandement leur œuvre, eut ses légendes, sinon ses miracles. Si on ne lisait l’histoire de Sophane dans un chapitre d’Hérodote, on la croirait tirée d’un poème de l’Edda. Ce Sophane, Athénien du bourg de Décélie, s’était muni, pour le combat, d’une ancre de fer attachée par une chaîne d’airain à la ceinture de sa cuirasse. Il marchait ainsi, vaisseau vivant, sur les flots de sang des mêlées. Quand les ennemis approchaient, il jetait l’ancre dans le terrain sablonneux ; et là, rivé au sol, le glaive en avant comme un bec de proue, il attendait