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ESCHYLE.

tenu sa promesse, sa ville et son temple étaient délivrés. Si la Grèce avait eu la couronne obsidionale avant Rome, elle l’aurait posée sur ses cheveux rayonnants.

Cependant Xerxès approchait d’Athènes, il la trouva presque déserte : le peuple en masse avait quitté ses murailles de pierre pour les murs de bois où l’entraînait Thémistocle. Un serpent qu’il avait charmé, sans doute par l’entremise de ses prêtres, donna le signal de ce grand départ : les Exodes ne se font qu’à coups de prodiges. Ce serpent hiératique gardait l’ancien temple de Pallas, blotti dans le rocher qui le supportait. Invisible, d’autant plus divin : sa présence n’était attestée que par le gâteau de miel qu’on déposait tous les mois, au bord de son trou, et qui disparaissait aussitôt. Or le gâteau, servi au jour fixé, fut retrouvé intact le lendemain. Signe certain, augure évident : comme les rats qui sortent d’une forteresse la veille de sa prise, comme les cigognes qui s’envolent des toits d’une ville que le feu menace, le serpent avait abandonné l’Acropole voué à la destruction. Il suivait sans doute la Déesse fuyant à grands pas vers la mer. La population n’hésita plus, elle quitta en hâte ses foyers, et se réfugia sur la flotte qui transporta les exilés hors d’état de porter les armes à Égine, à Salamine, à Trézène. L’hospitalité de cette dernière ville fut celle d’une