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ESCHYLE.

guerre par sa seule masse, il devait tout submerger.

IV

La petite Grèce attendait cet énorme choc, et cette attente semblait le sursis d’un arrêt de mort. Aucun espoir apparent ; la défense, aux yeux des sages, était une démence. Des espions envoyés à Sardes avaient été pris, on allait leur trancher la tête : Xerxès, averti, les fit passer devant son armée, et les renvoya dire aux Grecs ce qu’ils avaient vu. Ils sortirent terrifiés du gouffre d’hommes qu’ils avaient sondé, criant et prédisant le naufrage.

La trahison et la lâcheté débandaient d’avance les rangs de l’Hellade. Argos et Thèbes désertaient. La Crète refusait le secours que Corcyre promettait et ne donna pas. Les Thessaliens, les Locriens, les Achéens, les Doriens envoyaient « la terre et l’eau » à l’ennemi, et cet hommage fit une boue qui les a presque ensevelis. Ils disparaissent, dès ce moment, de la grande histoire, toute vertu s’est retirée d’eux : ces renégats de la Grèce sont désormais excommuniés de sa vie sublime.

Les Dieux eux-mêmes trahissaient ou décourageaient. La vapeur des trépieds était noire comme