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ESCHYLE.

— plus de trois millions d’aujourd’hui — a rassasier cet hôte dévorant. Après son départ d’Abdère, Mégacréon exhorta ses concitoyens à monter au temple et à remercier les dieux de ce que le Grand Roi n’avait point coutume de se mettre table deux fois en un jour ; car ils auraient été à jamais ruinés, s’il leur avait fallu lui donner, le matin, un festin pareil à celui du soir.

La terreur marchait en tête de l’invasion avec la famine. En même temps que ses races, l’Asie amenait ses dieux sur l’Europe : des dieux féroces, affamés de mort, et dont les rites étaient des supplices. Le noble Olympe hellénique était menacé de nouveau par une gigantomachie de démons barbares. Depuis les conquêtes de Cyrus, le culte primitif de la Perse, tout de lumière et d’idéal, pur comme le feu qu’elle adorait, avait été corrompu par les immondes mythologies sémitiques. Elles lui avaient donné le goût du sang et des sacrifices homicides, elles l’avaient initié aux atrocités des conjurations et des magies scélérates. Il y parut aux bords du Strymon : Xerxès ne se contenta point de vouer au fleuve un holocauste de chevaux blancs, selon l’antique coutume des Aryens. Ayant appris que le territoire où siégeait son camp portait le nom de « Neuf-Voies », il y fit enterrer vifs neuf jeunes garçons et neuf jeunes filles du pays. La « Terre-Mère »