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ESCHYLE.

lyriques pour l’emportement de l’allure, l’audace effrénée des tours et des rythmes, le débordement des images. Leurs épithètes éblouissent, leurs exclamations font songer aux cris des orgies bachiques. Les vers de ses dithyrambes semblent quelquefois, pris d’ivresse, exécuter une saltation sacrée autour de l’idée. La Grèce, telle qu’il la fait voir, apparaît illuminée et défigurée par les éclairs de l’Apocalypse. Ses métaphores sont prodigieuses, elles ont moins de beauté que d’énormité. Il appelle la poussière « sœur altérée de la boue », ou « messager muet de l’armée » ; la fumée, « sœur chatoyante du feu ». L’aigle qui dévore Prométhée est le « chien ailé de Zeus ». La mer est « la marâtre des vaisseaux » ; elle ouvre pour les engloutir « une âpre mâchoire ». Il la voit après les naufrages des Grecs revenant de Troie, « toute fleurie de cadavres ». Le pont que Xerxès jeta sur le détroit, il en fait « un joug à son cou ». Le chœur des Suppliantes crie au héraut égyptien qui l’insulte en débarquant à Argos : « L’outrage aboie sur le rivage. Tu l’as bue, l’onde amère, et tu me la rejettes à la face, toi qui me parles ainsi ! » Danaos raccoutrant à ses filles que les Argiens leur ont volé l’hospitalité, dit que « l’air s’est hérissé des mains droites levées de tout le peuple ». Tydée accuse Amphiaraos de « faire le chien couchant devant la mort ». Étéocle répond