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relevée par le bleu foncé d’un ciel pur. Si le vetturino ne nous avertissait pas qu’il ne faut point s’endormir sous peine de gagner les fièvres, on ne se croirait jamais au milieu de la malaria et d’une nature perfide. On voit bien qu’il n’y a pas d’habitation dans ces marais ; mais on attribuerait volontiers leur abandon au manque d’esprit spéculatif des gens du pays.

Vers onze heures, le soleil avait pris une force terrible. L’abbé ôtait son habit ; le bon archiprêtre lisait son bréviaire avec des ruisseaux de sueur sur le visage, le médecin chassait les mouches avec son mouchoir, la jeune lectrice était devenue une rose pourpre, et je poussais des soupirs à fendre les montagnes. Le Carthaginois seul continuait à regarder le pays d’un air radieux. Peu à peu l’assoupissement s’emparait de la voiture entière, et les têtes s’en allaient ballottant d’une épaule à l’autre. Don Giuseppe, le conducteur attentif, remarque le danger et entonne une chanson d’une voix de stentor ; nous allions nous rendormir encore, lorsqu’il s’écrie :