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comme une de ces comètes dont on n’a pas eu le temps d’étudier la marche. Aussitôt qu’on ne le vit plus, on l’oublia, et on revint à Goldoni par la pente inévitable de la routine.

À quel point cet injuste oubli a été poussé en Italie, et particulièrement à Venise, c’est ce que j’aurais refusé de croire si je ne l’avais vu par moi-même. Au mois d’octobre étant à Venise, je cherchais sur les affiches de théâtre une pièce qui ne fût pas traduite du français. On joua un soir, au théâtre Apollo, une comédie de Goldoni, et je pris un billet. Au premier mot, je reconnus le Dépit amoureux, grossièrement transformé. Dans mon désappointement, je sortis en disant qu’il n’y avait pas moyen de voir en Italie une pièce italienne, et que Gozzi avait eu bien raison de se moquer des plagiaires. Mes voisins se mirent en fureur contre moi, et me soutinrent en face que leur Goldoni était trop riche pour voler les autres, et que les Amants querelleurs ne devaient rien à personne, ce qui ne me persuada point. Le lendemain, je de-