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conte de nourrice que le public écoutait en palpitant de plaisir, mais dont le lecteur ne se soucierait guère et que Gozzi appelait une baliverne magique propre à ressusciter la comédie dell’arte.

Tout en riant d’un succès populaire gagné à si peu de frais, Gozzi n’entend pas précisément raillerie sur l’article des féeries orientales. L’Amour des trois oranges le captive lui-même à la représentation ; il s’émeut devant sa propre invention. Cette première pièce n’était qu’un canevas, il faut aller plus loin, restaurer ce que Goldoni a détruit, tracer des règles à la comédie dell’arte, et créer en même temps un genre nouveau, le genre fiabesque. Cette résolution épouvanta la coalition Chiari et Goldoni. Les prologues de San-Salvatore et de Sant’Angelo mirent leurs bonnets de travers, et attaquèrent ouvertement Gozzi ; mais il était trop tard, le coup avait porté. La foule désertait, on courait aux fables de nourrice.

Le solitaire continuait à se promener sur la place de Saint-Moïse, les mains derrière le