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On ne connaît pas bien un poëte si on n’a pas quelque idée de ses amours. Gozzi a fort heureusement écrit lui-même l’histoire de ses Trois Amours principales. Les deux premières, qui eurent Zara pour théâtre, ne sont que des aventures ; la troisième est un petit roman dont la scène est à Venise. Ou a tant fait de romans vénitiens qu’il est bon d’avoir un récit véritable à leur comparer. Avant de dire comment Gozzi devint poëte comique, ouvrons un peu les Trois Amours principales de l’auteur. Il n’y a qu’à traduire, et ces histoires montrent clairement où en étaient les mœurs à Venise et à Zara dans le xviiie siècle.

Pendant ses fraîches années, Gozzi avait auprès des femmes une retenue extrême, mais sans timidité, puisqu’elles ne l’effrayaient pas et qu’il recherchait leur compagnie. Ce qui lui nuisait le plus était l’habitude de métaphysiquer, dont apparemment le beau sexe dalmate ne s’accommodait pas, et qui le fit souvent passer pour un niais. À Zara, il fallait qu’un officier allât vite en besogne, et Gozzi perdait son