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dans les moments d’émotion et une imagination tout à fait orientale, on pourrait dire que ces qualités opposées lui venaient du sang dalmate, souvent mêlé à celui des croisés de tous pays qui allaient en Palestine. On ferait ainsi au génie de Gozzi une généalogie hétérogène, où Dervis Moclès se trouverait allié à Rabelais et à Shakspeare, mais on risquerait de tomber dans des aperçus plus ingénieux que vrais, et comme la vérité mérite quelques égards, je laisse les parallèles à d’autres plus hardis ou plus exercés. Jacques- Antoine, père de Charles Gozzi, homme instruit, d’un caractère bizarre, menait à Venise le train d’un grand seigneur. Il fit construire dans son palais une salle de spectacle où il donna des représentations qui lui coûtèrent beaucoup d’argent. Ses onze enfants montaient sur ce théâtre et composaient de petites pièces auxquelles on les reconnut pour de jeunes prodiges. Ce père prodigue dissipa ainsi somptueusement son bien et celui de sa femme, Angela Tiepolo, dernier rejeton de cette noble race qui donna