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caroni, vide le flacon de vin, se couche sur le lit et s’endort. Cependant le mari arrive sans avoir rencontré sa femme. Le désordre qu’il voit chez lui est bien fait pour l’étonner. Aussitôt la jalousie le prend aux cheveux. Il jure de se venger sur les deux coupables, et attend le retour de sa femme le couteau à la main. À Paris, nous aurions ri de sa colère ; à Naples, l’auditoire frissonna de terreur, car on savait de quoi le pêcheur jaloux était capable. Heureusement un dialogue comique vint dissiper cette velléité de tragédie. L’énergie toute napolitaine de la jeune femme la tire d’embarras d’une façon inattendue.

— Que tu es sot ! dit-elle à son mari : si j’avais un amoureux, est-ce que je lui donnerais ton souper ? est-ce que je le griserais pour le mettre sur ton lit à l’heure où tu dois rentrer ? Quand je voudrai te tromper, je te boucherai les yeux avec du mastic, car tu es un lourdaud, et je suis plus fine que toi. Allons, mets ton couteau dans ta poche, puisqu’il n’y a plus rien à manger. Je comprends pourquoi