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fournissent ses meilleures scènes , et le parterre peut en tirer quelque fruit. J’ai entendu un soir des femmes du peuple qui, en se voyant jouées au naturel, un peu étonnées de la fidèle ressemblance, se disaient à l’oreille : « Voilà bien comme nous sommes. » C’était à la première représentation d’une pièce appelée les Trois don Limon (don Limon est le nom qu’on donne aux incroyables de bas étage). La scène se passe dans une locanda de Portici. La servante et une blanchisseuse sont toutes deux amoureuses du garçon de ce cabaret ; toutes deux se croient aimées ; elles se disputent le cœur du cameriere avec l’ardeur et la vivacité napolitaines. Les propos s’enveniment, on se dit des injures et on se menace de coups de couteau. Les deux mégères, nez contre nez, les mains sur leurs genoux, crient de toutes leurs forces : « Je te tuerai si tu me pousses à bout. — Tu seras cause que je ferai un malheur ! » Sur ces entrefaites arrivent les trois don Limon, qui demandent à déjeuner, mangent et boivent, chacun d’eux comptant sur ses camarades pour