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désert, redouté des passants attardés, que l’on nomme la plaine des Malassis.

Depuis longtemps déjà, les habitants de la commune ont demandé, vainement d’ailleurs, l’assainissement de cette partie de l’ancienne ville, qui est pour la ville neuve une perpétuelle menace.

Une population très mêlée, mais surtout composée de chiffonniers, y habite et trouve asile dans des cahutes de bois vermoulu, où le vent fait rage, où la pluie, filtrant par les toits délabrés, suinte dans ces étranges logis.

À l’intérieur de ces masures lépreuses, vivent pêle-mêle des familles entières, et les enfants, sales et loqueteux, y grouillent dans la vermine, parmi les détritus de toutes sortes.

C’est dans une de ces misérables cabanes, assez isolée des autres cependant, qu’habitait un vieux chiffonnier de soixante et onze ans, le père Martin.

Il vivait seul, avec son chien, Sultan, un superbe bouledogue, dans un taudis infect. Le pauvre homme n’avait plus la force de travailler ; on lui jetait quelquefois, quand on y pensait, quelques croûtes de pain qu’il partageait avec son fidèle compagnon.

Jeudi matin, les voisins du père Martin s’étonnèrent de ne l’avoir pas vu depuis sept ou huit jours, puis ils s’inquiétèrent, des femmes ayant affirmé avoir entendu, plusieurs fois, à la tombée de la nuit, le chien « hurler à la mort ».