Page:Paul Vibert - Pour lire en bateau-mouche, 1905.djvu/388

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 361 —

Lorsqu’elle nous apparaîtra comme une reine des pays fabuleux, la gorge couverte des perles du plus bel Orient — les globes d’électricité nous en donneront du moins l’illusion.

Lorsque les rumeurs vagues des orchestres hongrois et des folles orgies monteront jusqu’à nous en une buée enivrante, ce sera le moment de mettre en branle notre orgue à vapeur et de faire tourner nos chevaux de bois pour éclabousser de lumière le bleu sombre et profond du firmament, car les poètes et les amoureux feront queue aux pieds de la Tour.

J’ai déjà des demandes pour soumissionner le monopole de l’enlèvement du crottin et je compte installer un jeu de bagues qui ne fonctionnera que le soir ; mais alors ça coûtera deux louis, une bagatelle, quoi.

Les anneaux, les vulgaires anneaux seront remplacés par des scarabées d’or, par les lucioles fantastiques du Mexique, par les coucouilles éblouissantes d’Haïti, dont j’ai acheté trois navires pleins, à l’avance et, tournant toujours à toute vitesse dans la douceur infinie des belles nuits d’été, les poètes croiront décrocher des étoiles et les amoureux fixeront l’insecte éclatant dans la chevelure parfumée de l’amante !…

Ceci n’est pas un rêve, M. Eiffel, cette évocation sera la réalité de demain si vous le voulez ; il ne tient qu’à vous que Paris éclabousse l’univers dans un éblouissement suprême.