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— Et surtout, Mesdemoiselles, n’oubliez pas vos rôles !

Et ces pauvres enfants s’en vont ainsi, figurantes du grand monde, jouant la comédie dans un monde frelaté et interlope, quoique ou parce que cosmopolite.

Pour mon compte, je ne sais rien de plus attristant que ce métier des mannequins, pendant les nuits froides d’hiver, à Paris, chez les rastas, des environs de l’Arc de Triomphe de l’Étoile.

— Mais, peut-être, me direz-vous, séduit par leur beauté, leur grâce et leur distinction native de Parisienne, un noble étranger, un riche planteur peut-il en épouser une de temps en temps ?

— Hélas, non, le temps est passé où les rois épousaient les bergères et tout ce qu’elles peuvent rapporter de ces nuits de figuration, c’est un peu plus de dégoût de la vie, le mépris des hommes et de l’amour même et la terrible phtisie.

Aussi, frappées de toutes ces misères navrantes — d’autant plus navrantes que dorées — un certain nombre de mannequins de chez les plus grands couturiers de Paris ont, paraît-il, résolu de se grouper en syndicat. On m’affirme qu’elles auraient trouvé des braves gens, honnêtes et désintéressés, résolus à les seconder. Je le crois sans peine et cela me met au moins un peu de baume dans le cœur.

Ces pauvres mannequins ne forment-elles pas comme la suprême aristocratie de ces petits trottins, de ces moineaux parisiens du sexe faible qui